Bordeaux : une grande rétrospective sur Rosa Bonheur au Musée des Beaux-Arts

Cette exposition met à l’honneur une artiste hors normes, novatrice et inspirante. Véritable icône de l’émancipation des femmes, Rosa Bonheur plaça le monde vivant au cœur de son travail et de son existence.

À l’occasion du bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur à Bordeaux, le musée des Beaux-Arts de sa ville natale et le musée d’Orsay, Paris, organisent une importante rétrospective de son œuvre. Le Château de Rosa Bonheur à Thomery (Seine-et-Marne), où l’artiste vécut près d’un demi-siècle, ainsi que le Musée départemental des peintres de Barbizon sont les partenaires de l’exposition.

Le bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur est inscrit au calendrier des commémorations de France Mémoire 2022. Il s’agit de la première rétrospective consacrée à l’artiste depuis celle présentée en 1997 à Bordeaux, Barbizon et New York.

Elle s'engagea pour la reconnaissance des animaux dans leur singularité. Par sa grande maîtrise technique, elle sut restituer à la fois l’anatomie et la psychologie animales. Cette exposition permet de faire (re)découvrir au public la puissance et la richesse de son art, ainsi que sa vie de femme libre, devenue mythique, et son œuvre, populaires aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Cette exposition est présentée en 2022 à Bordeaux puis à Paris. À Bordeaux, elle se déploie entre la Galerie des Beaux-Arts et l'aile nord du musée et rassemble près de 200 œuvres – peintures, arts graphiques, sculptures, photographies et documents – issues des plus prestigieuses collections publiques et privées d'Europe et des États-Unis. Par son sujet et ses enjeux, au cœur de l’actualité, cette exposition s’inscrit dans le courant international des expositions consacrées aux artistes femmes et dans le regain d’intérêt pour la thématique animalière qui sera mise à l’honneur à l’occasion du Festival d’histoire de l’art de Fontainebleau cette année.

 

> Rosa Bonheur (1822-1899), Deux Lapins, 1840, huile sur toile © Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, photo F. Deval.


▶️ UNE ŒUVRE PUISSANTE ET NOVATRICE

Issue d’une famille d’artistes, Rosa Bonheur réalise une œuvre abondante, fruit de son inlassable observation des animaux qui l’entourent et qu’elle cherche à étudier par tous les moyens possibles. Puisant son inspiration dans son quotidien mais aussi dans ses voyages, en Auvergne, dans le Nivernais, dans les Pyrénées, ainsi qu’en Écosse, elle montre une curiosité insatiable pour la diversité des espèces et leur écosystème. Elle est également fascinée par la beauté sauvage des grands espaces de l’Ouest américain, et de ses habitants, humains ou non, même si elle ne put jamais s’y rendre. L’artiste prit un grand plaisir à représenter Buffalo Bill et tous les acteurs du Wild West Show en 1889.

Rosa Bonheur sut très tôt imposer son talent et réalisa une carrière exemplaire jalonnée d'honneurs et de récompenses. Elle se mesura aux plus grands maîtres du genre animalier, longtemps réservé aux hommes, et se confronta à des formats monumentaux, conférant à ses œuvres la grandeur de la peinture d’histoire.

▶️ UNE AMOUREUSE DU VIVANT

Le regard qu’elle porte sur le monde qui l’entoure témoigne d’une vision tout à fait exceptionnelle de la flore comme de la faune. Fascinée par les animaux, Rosa Bonheur avait rassemblé autour d’elle, dans sa propriété de By, à la lisière de la forêt de Fontainebleau, une formidable ménagerie, comptant des dizaines d’espèces différentes, où se côtoyaient notamment moutons, chiens, cerfs et fauves.

Plaçant l’animal au cœur de sa création artistique au sein de spectaculaires compositions ou en l’isolant dans de véritables portraits, Rosa Bonheur sut créer une œuvre expressive, d’un grand réalisme et dénuée de sentimentalisme, nourrie des découvertes scientifiques et de l’attention nouvelle portée aux espèces animales des terroirs, remettant en cause la hiérarchie entre les espèces.

L’exposition joue sur les ruptures d’échelles, l’artiste ayant peint de très petits formats ou au contraire des œuvres monumentales, le plus souvent panoramiques et dynamiques, tout autant que de véritables portraits en pied d’animaux. C’est ainsi que Rosa Bonheur dépeint la majesté du cerf du Roi de la forêt (Collection particulière, USA) ou encore la beauté et la puissance de chevaux à demi sauvages dans La Foulaison du blé en Camargue (Musée des Beaux-Arts de Bordeaux). L’artiste énonce leur appartenance au monde rural et à la vie paysanne tout en exaltant leur force tellurique. Elle célèbre l’agriculture et la fécondité de la terre nourricière, et donne forme à un poème de Frédéric Mistral mis en musique par son ami Charles Gounod.

> Rosa Bonheur (1822-1899), El Cid, tête de lion 1879, Huile sur toile © Photographic Archive, Museo Nacional del Prado, Madrid.


▶️ UNE PERSONNALITÉ HORS DU COMMUN

Célébrée dès son vivant des deux côtés de l’Atlantique, cette personnalité fascinante, dont l’exposition se propose de dévoiler des aspects peu explorés, voire méconnus, sut s'imposer aussi bien en tant que femme libre qu’artiste officiellement reconnue dans un siècle très corseté. Première femme artiste à recevoir la Légion d’honneur, Rosa Bonheur a su bénéficier d’une efficace stratégie commerciale et s’associer aux marchands et collectionneurs les plus éminents pour dominer le marché de l’art et conquérir son indépendance financière et morale. Véritable « star » en son temps, artiste virtuose et exigeante, elle organisa sa vie autour de son travail et de la quête incessante de perfectionnement, accompagnée de femmes, et plus particulièrement de son amie de toujours Nathalie Micas, qui vécut à ses côtés plus de quarante ans, et de sa « sœur de pinceau », la peintre états-unienne Anna Klumpke, avec qui elle partagea les dernières années de sa vie et à qui elle confia l’héritage de sa postérité.

Rosa Bonheur fut rapidement perçue comme un modèle à suivre dans la quête d’indépendance des femmes, et des artistes plus particulièrement. Articles et revues, françaises, mais surtout anglaises ou américaines, témoignent de cette force inspiratrice pour les générations futures. La diffusion de l’image de l’artiste fut telle, qu’en plus de nombreux portraits peints, photographiés, ou gravés, l’œuvre de Rosa Bonheur tout comme son portrait, devinrent le sujet de ce que l’on appellerait aujourd’hui des « produits dérivés ».

L’une des originalités de l’exposition consiste à présenter une importante sélection d’études et d’esquisses peintes et dessinées, permettant d’apprécier la part du dessin dans le processus créatif de l’artiste, et donnant à voir des feuilles d’une rare beauté. Une esquisse monumentale totalement inédite, récemment découverte au château Rosa Bonheur, est exposée pour la première fois ainsi que des photographies dessinées qui révèlent un aspect inattendu de la création de l’artiste. Des parts plus insolites de son travail souvent destinés à une sphère plus intime (peintures sur galets, marrons sculptés…) sont également présentés. Enfin, l’exposition insiste sur la personnalité de Rosa Bonheur, son humour, son goût pour les caricatures et les fructueuses relations qu’elle entretenait avec des personnalités du monde musical, littéraire ou scientifique de l’époque.

> Rosa Bonheur (1822-1899), La Foulaison du blé en Camargue, 1864-1899, huile sur toile © Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, photo F. Deval.


▶️ UNE ŒUVRE QUI RÉSONNE ENCORE AUJOURD’HUI

200 ans après sa naissance, l’art et la personnalité de Rosa Bonheur sont plus que jamais d’actualité : la place des femmes dans l’art et la société, l’approche de la nature et du vivant, la cause animale et l’écoféminisme. L’exposition s’accompagne d’une programmation culturelle pluridisciplinaire et de projets issus des champs éducatifs et sociaux, en cohérence avec les actions en faveur de l’égalité femmes-hommes que le musée mène depuis plusieurs années.

Cette rétrospective est l’occasion de stimulants partenariats culturels parmi lesquels les Archives de Bordeaux Métropole, la Bibliothèque Mériadeck, le Centre commercial Mériadeck, le Conservatoire de Bordeaux - Jacques Thibaud, l’ebabx école supérieure des beaux-arts de Bordeaux, le Fonds régional d’art contemporain Nouvelle-Aquitaine/MECA, la librairie Mollat-Station Ausone, le Muséum de Bordeaux - Sciences et nature, l’Office du tourisme de Bordeaux Métropole, l’Opéra national de Bordeaux, la Philomathique de Bordeaux, le Service d'animation de l'architecture et du patrimoine de Bordeaux, Les Lecteurs migrateurs ainsi qu’avec l’Association des Amis de Rosa Bonheur et le Château de Fontainebleau.


En savoir plus : https://www.musba-bordeaux.fr/


Du mercredi 18 mai au dimanche 18 septembre 2022.


Sandra Buratti-Hasan, directrice-adjointe, conservatrice des collections XIX-XXe siècles du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux.